Finie la jungle: acheter des logiciels sans remords

Finie la jungle: acheter des logiciels sans remords

Raoul Gröning

A l’achat de logiciels standard, il est possible d’obtenir de grands rabais. Mais en raffinant les modèles de licence, les fournisseurs réussissent à augmenter leurs droits. Quelques mesures permettent aux acheteurs de l’éviter.

L’acquisition de logiciels implique souvent de grands investissements. Il n’est pas rare qu’elle soit la résultante de décisions stratégiques associées à d’importants changements dans les processus de l’entreprise. Une approche structurée, rationnelle et systématique dans le choix des softwares est donc nécessaire pour éviter de lourdes dépenses en termes de temps et d’argent, par exemple lorsque le développement ultérieur de fonctions manquantes se révèle nécessaire.

Sortie du dilemme

Une étude Gartner montre que les dépenses des entreprises en logiciels augmenteront à l’échelle mondiale de 8 à 11 % par an d’ici à 2020. Deux raisons peuvent expliquer cette croissance. Les entreprises investissent davantage, par exemple dans la cyber-security ou la digitalisation. D’autre part, les producteurs de logiciels disposent, plus que dans toute autre branche, d’un nombre considérable d’instruments pour imposer des hausses de prix. En fin de compte, leurs clients sont victimes de l’enfermement propriétaire (vendor lock-in effect).

L’achat peut contrecarrer ce dilemme en professionnalisant les appels d’offres.

Définir les demandes

La procédure de sélection d’un nouveau software standard passe généralement par trois phases: l’appel d’offres, le proof-of-concept (PoC) et la décision. Dans un PoC, l’application logicielle ou un prototype est testé au niveau de la fonctionnalité, des interfaces et de la sécurité. Comme un PoC peut être coûteux, il arrive souvent que seul un software soit testé dans un premier temps. Pour l’acheteur, cela signifie que tous les aspects commerciaux doivent être négociés avant le PoC.

Un cahier des charges se révèle ici opportun. Les demandes fonctionnelles qui nécessitent d’être programmées doivent être désignées par le fournisseur en indiquant les coûts. Une comparaison rapide et transparente des offres est ainsi possible.

Modèles de licence

Les modèles de licence des fournisseurs de logiciels ressemblent à une jungle. Il est d’autant plus important d’en saisir les variables. Une spécification au niveau du cahier des charges permet au prestataire de faire des offres bien ciblées.

Si, par exemple, les données ne doivent pas être sauvegardées dans le cloud, une solution «on-premise» est envisageable. Si le modèle «Software-as-a-Service» (SaaS) est une variante possible, il faut considérer les coûts structurels de la solution «on-premise». Dans le cas du «on-premise», le logiciel est installé et exploité sur l’infrastructure du client ou chez son prestataire, alors que, dans la configuration SaaS, il est géré par le fournisseur.

Le choix entre l’achat et la location réduit encore la complexité. Il est recommandé de demander une offre pour une licence «pay-as-you-use» et pour une licence d’entreprise. Les modèles «pay-as-you-use» décomptent sur la base de l’utilisation effective. Dans sa forme fondamentale, la licence d’entreprise prévoit une utilisation illimitée du logiciel pour les finalités de l’entreprise. Les concepts ne sont pas standardisés et de nouvelles variantes apparaissent constamment, très éloignées du modèle initial. En termes d’utilisation de la licence et de prix à l’unité, les deux modèles représentent l’extrême et servent de point de départ pour les négociations.

Métrique de licence et droits de jouissance

Une autre composante importante est la métrique de licence. Elle sert à calculer les frais de licence du logiciel. Les paramètres courants sont le nombre d’utilisateurs ou la puissance du processeur. Il faut se montrer prudent face aux métriques non prévisibles et délimitables, comme, par exemple, le nombre de transactions. Une attention particulière doit être accordée aux droits de jouissance (use rights). Des restrictions au niveau géographique ou l’exclusion d’utilisateurs externes (clients) peuvent rapidement conduire à des transgressions. Il est important de mettre en lumière la métrique de licence et les droits de jouissance avec les utilisateurs opérationnels internes.

Sous-licence

Une sous-licence peut générer de grands frais. Souvent, des licences supplémentaires ne sont pas nécessaires. Il est donc bon de convenir d’une période de «true-up» d’un mois. Si un manque est constaté, le client a la possibilité de réduire le nombre de licences. Si de nouvelles licences doivent être attribuées, il est important de préciser dans le contrat que les rabais négociés valent aussi dans ce cas. L’achat évite ainsi, dès le début, des pénalités.

Avec un Software Asset Management (SAM) efficace, on peut garantir durablement le respect des restrictions de licence. Un SAM a pour objectifs d’optimiser l’utilisation de logiciels et d’assurer le respect des termes de la licence. La détermination et le contrôle du stock de licences peuvent être automatisés grâce à un logiciel spécialisé.

Durée de licence

Entre la phase de test et d’implémentation et l’exploitation productive du logiciel standard, plusieurs mois peuvent s’écouler. Le cahier des charges doit prévoir des licences d’essai gratuites et un service de conseil pour le PoC. Il faut éviter de conclure des contrats prévoyant une obligation d’achat sur plusieurs années avant la mise en service réussie du software. Dans le cas de contrat de location, l’achat doit veiller à une option favorable en cas de renouvellement (renewal). Celle-ci fait souvent défaut dans les contrats standard ou est assortie d’une forte majoration.

Service Level Agreement (SLA)

Les SLA promettent souvent des temps de réaction rapides, une assistance 24/7 et de grandes disponibilités systèmes. En cas de manquement aux principes du Smart Contract, les conséquences automatiques sont négociables sous réserve. De plus, le SLA doit garantir la mise à disposition de updates et upgrades.

Si l’achat tient compte de ces principaux points, on peut s’adresser à SAP, Oracle, Microsoft, IBM and Co sans remords.

Raoul Gröning

Raoul Gröning

Directeur de Clickbuyer GmbH, l’auteur est spécialiste de l’achat électronique et des enchères en ligne. Il manageait auparavant le procurement chez Siemens et Continental. Il enseigne la gestion de l’approvisionnement stratégique à la haute école spécialisée Kalaidos.