Compte-rendu de la Conférence Achats 2020

Souvent abordés lors d’événements et de publications diverses ces derniers mois, les achats responsables étaient, cette fois, présentés comme étant au cœur des business models des organisations les plus performantes (titre de la conférence). 

Un état des lieux complet

Le webinaire du 24 septembre a permis de proposer un éclairage des pratiques actuelles en matière d’achats responsables fondé sur l’évolution des pratiques récentes et plus anciennes.

L’introduction proposée sur ce sujet par Bruno Frel, référent expert achats responsables à l’AFNOR, a permis de mesurer le chemin parcouru en quelques décennies. Elle a également permis de préciser l’importance prise au cours de l’histoire par les grandes dimensions caractérisant les achats responsables: économique (achats rentables), sociale (achats éthiques, achats solidaires, achats équitables …) et environnementale (achats verts, achats éco-responsables …).

Deux tables rondes ont alors pu se succéder. La première avait pour vocation de présenter l’intérêt du monde de la recherche et de l’enseignement pour le sujet. Elle visait également à montrer les apports des chercheurs et chercheuses à l’évolution des pratiques: passer d’une vision parfois uniquement philanthropique, limitée dans sa diffusion et ses impacts, à des intérêts économiques mieux compris car démontrés par la recherche (et bien sûr validés sur le terrain), intérêts contribuant à une diffusion plus massive des bonnes pratiques. Fabienne Fel, Professeur à l’ESCP, Gwenaëlle Oruezabala, Professeur à l’Université de Nantes, et Richard Calvi, Professeur à l’Université Savoie-Mont-Blanc, ont tous trois apporté des visions complémentaires sur ces sujets, tout en précisant les origines de leurs intérêts personnels de chercheurs pour les achats responsables. Chacun a pu confirmer le rôle de plus en plus central des achats responsables dans les stratégies achats, mais aussi dans l’atteinte des performances des organisations, tant sur les plans social et environnemental que sur le plan économique. Leur regard d’enseignants et de formateurs de futurs acheteurs a également permis de souligner l’intérêt croissant des étudiants pour les achats responsables, intérêt découlant le plus souvent d’une volonté forte et affirmée de contribuer à la protection de l’environnement. Entre autres sujets, Fabienne Fel, Gwenaëlle Oruezabala et Richard Calvi ont respectivement abordé en détail les questions liées à la maturité des démarches RSE, aux liens entre achats responsables et réduction des risques et enfin à la qualité des collaborations entre clients et fournisseurs.

La seconde table ronde réunissait des responsables achats s’activant au quotidien à la mise en œuvre des achats responsables, sous diverses formes, au sein de leurs organisations. Elle a permis à Leila Gharnout, Purchasing Manager chez ARaymond, Raphaël Bellière, Directeur achats digitaux, informatiques et prestations intellectuelles chez Suez, et Patrice Célérier, Responsable organisation et performance achats groupe chez Schmidt Group, de présenter les spécificités des approches développées au sein de leurs organisations. Servant leadership, liens avec les collectivités visant à développer le tissu économique local et engagement pour l’écosystème ont été au cœur des échanges. Ces derniers ont été enrichis par les chercheurs, toujours prompts à rebondir sur les sujets abordés, ainsi que par Fabrice Ménelot qui, en vrai expert des achats et du digital, plus que des achats responsables, a su poser de bienvenues questions décalées et emmener les propos bien loin des «sentiers battus».

Les évolutions à venir

Bâti sur le même principe que le premier, le second webinaire a d’abord permis à Juliette Guillemin Dupille, experte achats responsables et éthique des affaires au sein de l’AFNOR, de compléter la présentation de Bruno Frel en précisant ce que les évolutions les plus récentes des achats responsables nous disent des évolutions à venir. Si le renforcement des obligations et des contraintes pesant sur les entreprises jouera sans doute un rôle important à court terme, c’est peut-être une réelle prise de conscience du rôle des entreprises au sein de leur écosystème qui contribuera le plus à changer les comportements d’achats à plus long terme. C’est ce qu’ont pu confirmer les chercheurs au travers de la présentation de leurs derniers résultats de recherche, mais également des travaux réalisés en Europe et aux Etats-Unis. La notion d’écosystème économique apparaît, qui plus est, de plus en plus présente dans les travaux présentés par les étudiants. Ceci contribue sans doute à renforcer la légitimité de l’expression «management responsable des ressources externes», puisque de plus en plus, c’est bien de ce dont il s’agit lorsque l’on observe avec précision la mission et les activités concrètes des acheteurs.

Les responsables achats ont alors pu proposer leur vision de l’avenir des achats responsables, ainsi que les réalisations prévues à plus ou moins long terme. Les difficultés rencontrées ont également été abordées (manque de soutien de la direction générale, «surprise» des fournisseurs parfois déroutés par certaines approches, résistances au changement en interne, difficultés de mesurer les résultats obtenus …), permettant de proposer des solutions de nature à lever, au moins en partie, ces difficultés. Pour tous les intervenants, comme pour Fabrice Ménelot, la question des impacts sur l’activité économique apparaît comme un point essentiel.

Une responsabilité élargie

S’il apparaît clair, à l’issue de nos deux webinaires, que les achats responsables se trouvent bien au cœur des business models des entreprises les plus performantes, leur mise en œuvre permet sans doute de contribuer à quelque chose de plus grand que les performances économiques des organisations directement concernées. La situation économique difficile que connaissent de nombreuses organisations aujourd’hui le rappelle bien en effet: c’est à la résilience de tout l’écosystème que l’on œuvre en responsabilisant davantage chaque jour les pratiques, résilience elle-même garante en retour et à plus long terme de la bonne santé économique de chacune des organisations.